Ici-bas, oh ! vraiment c'est une étrange chose :
Quand on souffre le plus, on prend un air joyeux
Quand on porte en son sein le cœur le plus morose
On met, pour le cacher, un sourire en ses yeux.
De sa peine chacun meurt, et personne n'ose
Ôter à son chagrin son voile insoucieux
Homme, on veut être gai comme un enfant bien rose
Et l'on refoule en soi sa douleur de son mieux.
Dans ce monde d'oubli, voilà, voilà l'usage !
Mais qu'on n'aille donc pas nous juger au visage
Ni prendre pour du vrai tout ce clinquant moqueur !
Comme un arbre fleurit et verdit à l'écorce
Quand son vieux tronc creusé penche et tremble sans force
On sourit au dehors, et l'on est mort au cœur.
Évariste Boulay-Paty. "l'apparence recueil : sonnets (1851) "